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Mystères républicains

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Joseph de Maistre disait que la république projetée par les révolutionnaires français revenait à créer une poignée de républicains et des millions des sujets, comme à Rome. Il reprochait notamment aux parlementaires de ne représenter que la nation au sens abstrait, sans avoir de compte à rendre aux électeurs. À ce sujet, il se résigna même à citer Rousseau - qu’il détestait, mais qui, comme on sait, rejetait le système représentatif. Maistre en arrive à affirmer qu’avec le système que la république française a adopté, les particuliers et les régions ont encore moins de pouvoir que sous la monarchie. Victor Hugo assura qu’en 1793, sur l’Assemblée nationale, avait soufflé un vent divin : rendre compte aux électeurs était donc inutile…. L’infaillibilité présidait forcément aux délibérations ! Le mouvement que fait le Peuple en votant était comme imprégné de grâce magique : émanant de l’inconscient - de la masse -, il créait une sorte de feu sacré dans le lieu de réunion - il y plaçait l’esprit saint !
 
Pour Maistre, ce dernier n’était que dans l’Église catholique, et donc se reflétait sur le front du Roi très chrétien, oint à Reims. Louis XV avait pourtant été en toute conscience parfaitement impie, et ses successeurs ne furent pas très différents. Louis XVIII n’avait que peu de foi religieuse. Dans la noblesse, on lisait surtout Voltaire et Diderot. Le parti religieux était pratique, parce qu’il sacralisait le pouvoir des élites ; mais au sein de celles-ci, on en riait, et de cela a dû naître la légende des apôtres qui ne se disaient inspirés par la divinité que pour mieux en imposer au peuple, ainsi que le raconte Rousseau dans son Contrat social.
 
Le système français actuel est hybride : l’oint de l’élection est donné à un seul homme, lequel est censé croire sincèrement à ce qui le relie au peuple. Le fait-il ? C’est aléatoire. Dans les faits, le peuple n’a pas les moyens de contrôler que le Président de la République exécute réellement son programme.
 
Mais la mystique présidentielle instaurée par De Gaulle allait au-delà des programmes : il s’agissait d’une relation psychique entre le monarque élu et la nation qui ressortissait à l’indicible. Or, on peut se demander ce qu’il en reste. Le peuple est plutôt fasciné par Paris, la tour Eiffel : le mythe de la cité-lumière. Le centralisme est défendu au nom de l’égalité républicaine, alors que tout le monde sait très bien qu’il donne un statut spécial à la capitale - statut qui fait de la France l’un des pays d’Europe où les inégalités sont les plus grandes: entre Paris et les provinces les plus pauvres, le fossé est énorme. Or, Rousseau rejetait le centralisme et affirmait qu’aucune ville ne devait prévaloir sur les autres dans une république égalitaire.
 
Il existe également une sorte de fétichisme en direction des réalisations des grandes entreprises nationales : les avions, notamment, font l’objet d’une sorte de culte. Mitterrand y participait, en affirmant que depuis les hauteurs d’azur, il voyait les dieux ! Le peuple a besoin de cristalliser dans des images précises son sentiment intime.
 
Serge Lehman a pensé répondre à cette attente en créant un super-héros pour l’Île de Francel’Optimum. Je crois aussi que c’est à l’art, et non à la technologie ou à la politique, de matérialiser le rêve, et de donner à voir le génie national.

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